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Vieillir à domicile : enjeu d'aujourd'hui et de demain

  • philippinelavoillo
  • 26 sept.
  • 6 min de lecture

Dernière mise à jour : 16 oct.

Les prochaines décennies devraient être synonymes de fort vieillissement de la population dans l’Y grenoblois. L’immense majorité des seniors souhaitant rester chez eux, les déménagements sont rares entre la retraite et le moment de la grande dépendance. Pourtant, les logements actuels sont peu adaptés à la perte d’autonomie, aussi bien dans le parc privé que dans le social qui fait pourtant l’objet de demandes croissantes.


Date de publication : 26 septembre 2025.



Quelle gérontocroissance en région grenobloise ?


Une pyramide des âges qui s'inverse progressivement

la base de la pyramide des âges s'érode, la pyramide s'inverse progressivement
Source : Insee, RP et Omphale

 Avec l’avancée en âge des baby-boomers, l’allongement de l’espérance de vie et l’érosion de la fécondité, la pyramide des âges iséroise se transforme. Selon le scénario central de projection démographique de l’Insee (Omphale[1]), entre 2021 et 2050, la part des plus de 75 ans passerait de 8.8 % à 15.2 %. Cette forte augmentation devrait ralentir voire s’essouffler progressivement après 2050. Le scénario est identique pour l’aire grenobloise incluant la Chartreuse et les 3 EPCI, le territoire compterait 101 571[2] personnes de plus de 75 ans en 2050 contre 60 154 en 2021.


Sur la période 2015-2021, le Pays voironnais et le Grésivaudan ont connu une gérontocroissance plus dynamique que la métropole. Après le fort dynamisme démographique des années 1980 et la densification de leur parc immobilier, ces territoires voient désormais une partie de leurs ménages vieillir dans les logements acquis durant cette période.  Ils attirent aussi des jeunes seniors dans leurs centralités, pour le cadre de vie attrayant mais proche des commerces et des services. La métropole grenobloise voit une gérontocroissance particulièrement marquée pour les plus de 85 ans au regard des autres tranches d’âge, qui s’explique par un vieillissement plus précoce que la périphérie.


Taux de croissance annuel moyen des effectifs par tranche d'âge entre 2015 et 2021 

Source : Insee, RP
Source : Insee, RP

 

Une population âgée qui déménage peu

Vieillir n’est pas forcément synonyme de dépendance, et la grande majorité des séniors souhaite vieillir à domicile, dans son environnement proche. Selon l'Insee en 2021, seulement 7.2 % des Isérois de plus de 75 ans vivent dans un établissement pour personnes âgées. Ils sont 10.7 % pour le Pays voironnais, 6.3 % pour la métropole et 5.1 % pour le Grésivaudan (plus faible taux du département). L’établissement pour personnes âgées reste donc un lieu de vie largement minoritaire. Ainsi, une très large majorité des seniors vit à domicile, y compris lorsque les signes de perte d’autonomie arrivent. Dans l’Y grenoblois, 75.4 % des bénéficiaires de l’Allocation Personnalisée d’Autonomie (APA) vivent à domicile en 2024. Parmi ces 10 600 bénéficiaires de l’APA vivant à domicile, 24 % sont en Groupe Iso-Ressources (GIR) 1 et 2, soit les personnes les plus dépendantes.

Enfin, la mobilité résidentielle des personnes âgées est plus faible que celle du reste de la population. Elle ne s’accroit qu’à deux moments clés. Il y a d’abord le passage à la retraite, en général une mobilité choisie (se rapprocher des enfants, retourner dans sa région d’origine, résider de manière permanente dans la résidence secondaire etc.). Puis vers 80 ans, lorsque le maintien à domicile n’est plus possible, il s’agit alors d’une mobilité contrainte. Entre les deux, s’installe une phase très stable pendant laquelle les seniors déménagent peu puisqu’en 2021, l’Insee relève que 96 % des seniors de l’Y grenoblois n’ont pas changé de logement.


Un parc de logements peu adapté à la perte d’autonomie

En 2013, le rapport de l’Anah/Cnav estimait que seulement 6 % des logements en France seraient adaptés à la perte d’autonomie[3].


Quelle que soit la typologie des territoires, la majorité des seniors sont propriétaires de leurs logements, notamment de maisons individuelles qu’ils occupent de longue date. Sur l’Y grenoblois, 75 % des 65 ans et plus possèdent leur logement. Cette part dépasse 90 % dans les communes les plus rurales, tandis qu’elle est inférieure à 70 % dans les communes les plus urbaines.


Nombre et part des ménages de 65-79 ans propriétaires d’une maison

Nombre et part des ménages de 65-79 ans propriétaires d’une maison

Source : Insee, RP
Source : Insee, RP

 

 

 

 



 

 Les dispositifs d’opération programmée d’amélioration de l’habitat (OPAH) constituent depuis 1977 le principal outil d’intervention dans les territoires sur le parc privé, en mobilisant les aides de l’Agence nationale de l’habitat (Anah). Néanmoins, la marche à franchir pour la massification des travaux d’adaptation reste importante.

En 2019 dans l’aire grenobloise, 60 % des ménages propriétaires occupants de plus de 60 ans sont éligibles aux aides de l’Anah, comme à l’échelle départementale. Cela concerne 23 000 ménages sur le territoire, pour seulement une centaine de dossiers déposés par an. Les propriétaires âgés à revenus modérés occupent pourtant majoritairement des logements anciens (avant 1975) : 62 % dans le Pays Voironnais, 68 % dans l’agglomération grenobloise, contre 60 % en moyenne départementale, et cumulent des problèmes de précarité énergétique.

Des locataires âgés sont également présents sur le territoire mais dans une moindre mesure : 22 % d’entre eux ont plus de 65 ans sur l’aire grenobloise. En 2024, la CAF relève que parmi les 2 631 allocataires d’une aide au logement de plus de 60 ans de l’aire grenobloise, 46 % sont locataires du parc privé avec un poids du loyer dans les revenus avoisinant les 50 %. Dans le parc privé aussi, les locataires pourraient mobiliser les aides de l’Anah. Toutefois, rares y ont recours (méconnaissance, nécessité de composer avec le propriétaire, précarité, etc.).

Enfin, du point de vue de l’accessibilité, il est à noter qu’une faible part des immeubles est équipée d’un ascenseur. En Isère, 47 % des résidences principales en immeuble collectif sont équipées d’un ascenseur. Cette part est supérieure pour la métropole (57 %) mais nettement plus faible pour le Pays Voironnais (38 %) et le Grésivaudan (25 %).


Un parc social particulièrement impacté par le vieillissement

Sur l’aire grenobloise, selon l’enquête OPS[4], un tiers des titulaires d’un bail d’un logement social ont plus de 60 ans en 2022. Compte tenu de l’évolution démographique, ils représenteront probablement la moitié des locataires du parc social de demain. Ils sont nombreux à demander un autre logement social : fin 2024, ce sont 58 % des demandes de logement social des plus de 65 ans sur le territoire, soit 1 500 demandes pour l’Y grenoblois dont 1 233 demandes sur la métropole. Ces demandes de mutations sont motivées par un logement inadapté à la perte d’autonomie mais aussi par le coût du loyer.


Ainsi, le rapport de l’Ancols relatif à l’adaptation au vieillissement et au handicap dans le parc social d’août 2024[5] pointe qu’environ 10 % du parc social seulement serait adapté à la perte d’autonomie. Bien que la grande majorité des bailleurs sociaux disent avoir adopté une stratégie pour répondre aux enjeux liés à l’adaptation de leur parc, l’accélération des travaux semble insuffisante par rapport au volume de logements à traiter.


Il y a également des seniors qui souhaitent accéder au parc social et ils sont de plus en plus nombreux, dans un contexte où l’accès au parc social est de plus en plus tendu. L’Y grenoblois est doté d’un parc social conséquent, et de ce fait, le territoire concentre 61 % de la demande de logement social des plus de 65 ans de l’Isère : à fin 2024, le SNE[6] dénombre 2 598 demandeurs âgés dont 79 % sur la seule agglomération grenobloise.

Les demandes d’accès des locataires venant du parc privé sont particulièrement importantes, c’est 24 % des demandes sur le territoire, signe d’un marché immobilier tendu. Avec 8.5 demandes de plus de 65 ans pour une attribution sur l’aire grenobloise en 2024, la pression sur le parc social de la demande senior est supérieure à celle de la demande globale, qui se situe à 5. Cette pression a augmenté depuis 2021 : les effectifs âgés augmentent, l’offre neuve sociale adaptée se raréfie et l’offre existante de logements sociaux adaptés est insuffisante, ce qui rend les attributions complexes.


Evolution des demandes de logement social des 65 ans et plus dans l'aire grenobloise

Source : SNE
Source : SNE

 

 

 

 

                                                             


[1] Omphale (outil méthodologique de projection d'habitants, d'actifs, de logements et d'élèves) est une application qui comprend un modèle théorique de projection de la population, des bases de données démographiques, des techniques d'analyse démographique et des outils de construction de scénarios pour le futur.

[2] Ce chiffre inclus le territoire de Chartreuse qui est associé au Pays voironnais dans le modèle

[3] Rapport de l’Anah et de la CNAV, Adaptation des logements pour l’autonomie des personnes âgées, Décembre 2013

[4] Enquête de l’Occupation du Parc Social (OPS) réalisée tous les 2 ans auprès des bailleurs sociaux et qui a pour objectif de connaitre les caractéristiques démographiques et sociales des occupants du parc locatif social

[5] L’Ancols est l’Agence nationale de contrôle du logement social Source : https://www.ancols.fr/publications/statistiques-etudes/ladaptation-du-bati-au-vieillissement-et-au-handicap

[6] Système National d’Enregistrement de la demande de logement social

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