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La protection de l’enfance : quelle situation sur la métropole grenobloise

Les missions de protection de l’enfance sont régies par le Code de l’Action Sociale et Familiale (CASF) et sont de la compétence des Départements.  Elles intègrent le repérage, la prévention et l’accompagnement des enfants en danger ou en risque de danger ainsi que leurs familles. Cela se traduit notamment par  :  

  • le traitement et l’évaluation des informations préoccupantes¹ 

  • la mise en œuvre de mesures de soutien à domicile  

  • la mise en œuvre de mesures de placement (en établissements, en familles d’accueil, chez des tiers dignes de confiance…)  


Prévention spécialisée 

​Depuis 2017, la métropole grenobloise contribue aux missions de protection de l’enfance via la mise en œuvre de la prévention spécialisée sur son territoire. Cette mission repose sur un travail de proximité avec des jeunes de 11 à 18 ans qui, du fait de leur situation sociale défavorisée ou de leur mode de vie, se trouvent ou risquent de se trouver en marge des circuits d'intégration sociale. En 2020, 3 606 jeunes ont été suivis dont 1 845 ont été en contact régulier avec les équipes éducatives et 1 761 ont fait l’objet d’un accompagnement spécifique.  

Une forte hausse des IP depuis 2016 

En 2020, 780 familles et 1400 enfants ont été concernés par une IP sur le territoire de l’agglomération grenobloise. Ce sont 530 enfants concernés de plus qu’en 2016, soit +61 % (pour +41 % en Isère). Cette croissance est notamment liée à la loi du 14 mars 2016 qui prévoit qu’à l’occasion de l’évaluation d’une situation familiale, la situation de tous les mineurs présents au domicile soit également évaluée. Comme sur l’ensemble du département, l’année 2020 romps la tendance : le nombre d’IP a diminué, probablement en raison des périodes de confinement et de la fermeture partielle d’un nombre important de structures, notamment des établissements scolaires, acteurs majeurs du repérage. Les 3/4 des situations reçues proviennent des services du procureur (28%), des services du Département (16 %), du SNATED (le numéro 119, 15 %) et de l’éducation nationale et des établissements scolaires (15 %).

Une fois l’IP réceptionnée par les services du Département, une évaluation a lieu auprès de la famille et de l’environnement de l’enfant pour déterminer si le danger ou risque de danger est avéré ou non. En 2020, après évaluation et décision du responsable de l’aide sociale à l’enfance, 42 % des IP sont non confirmées ou non fondées (parmi celles-ci, 68 % font l’objet d’une mise à disposition des services du Département auprès de la famille ou ont déjà un suivi médico-social), 31 % donnent lieu à une préconisation de mesure judiciaire.


En ce qui concerne le contexte familial, le premier sujet évoqué dans les situations évaluées concerne les difficultés éducatives : 46 % des enfants sont concernés en 2020. Les enfants sont de plus en plus exposés à des climats de violence au sein de la famille : leur nombre a doublé entre 2017 (135) enfants et 2020 (263) et concernent 21 % des enfants. 19 % des mineurs étaient exposés à des conflits de couple, ce qui met en évidence le besoin des professionnels d’être accompagnés dans la prévention et prise en charge de cette problématique. Enfin on constate en 2020 une augmentation du nombre d’enfants victimes de violences physiques. Leur nombre a plus que doublé entre 2017 et 2020 et concernent 14 % des enfants.


Parmi les enfants pris en charge par l’ASE, une majorité le sont à domicile
A savoir : quels sont les publics de la protection de l'enfance

​Selon l’article L222-5 du CASF, peuvent bénéficier d’une prise en charge par le service de l’aide sociale à l’enfance :

  • Les mineurs et leur famille ou tout détenteur de l’autorité parentale, confrontés à des difficultés risquant de mettre en danger la santé, la sécurité, la moralité de ces mineurs ou de compromettre gravement leur éducation ou leur développement physique, affectif, intellectuel et social;

  • Les pupilles de l’Etat ;

  • Les mineurs émancipés et les majeurs de moins de 21 ans confrontés à des difficultés familiales, sociales et éducatives susceptibles de compromettre gravement leur équilibre ;

  • Les femmes enceintes et leurs conjoints le cas échéant confrontés à des difficultés médicales ou sociales et financières.

Au 1er janvier 2021, 2 375 mineurs, majeurs et femmes enceintes ou avec enfants de moins de 3 ans bénéficient d’une mesure de soutien dans le cadre de l’aide sociale à l’enfance (hors aides financières). Cela représente 108 personnes de plus qu’un an auparavant, la hausse du TAG est plus marquée qu’en Isère (+5 % contre une stagnation en Isère).

54 % des enfants suivis sont des garçons et par rapport à la population âgée de moins de 21 ans sur l’agglomération, l’ASE prend en charge peu de petits enfants (moins de 6 ans) et beaucoup d’adolescents (12-17 ans), comme ce qui est observé sur le reste du département.

Depuis les lois de 2007 et 2016, la législation invite les Départements à développer des logiques d’intervention qui doivent permettre de ne pas séparer l’enfant et sa famille : cela traverse les pratiques quotidiennes de l’ensemble des acteurs de la protection de l’enfance. Les mesures éducatives à domicile² qu’elles soient judiciaires ou administratives (AEMO ou AED) concernent 47 % des personnes prises en charge contre 45 % en 2016. Inversement, les mesures de placement concernent 35 % des enfants (808) contre 42 % en 2016 (979). Le mode de placement principal reste l’établissement sur l’agglomération grenobloise, en lien avec la proximité des établissements. Le placement en famille d’accueil se situe toutefois à un niveau équivalent puisqu’il concerne 43 % des enfants placés.


ZOOM sur les enfants en situation de handicap pris en charge par l’ASE en Isère

Aux difficultés éducatives, viennent parfois d’adjoindre des problématiques de handicap. Au 31/12/2020, 15 % des enfants pris en charge par l’ASE ont une notification de la maison départementale pour les personnes en situation de handicap (MDPH). Parmi ces enfants, on compte 95 % de mineurs et 5 % de majeurs. On note une surreprésentation des garçons par rapport à la population prise en charge par l’ASE : 71 % de garçons et 29 % de filles ont une notification MDPH. 44 % de ces jeunes bénéficient d’une mesure d’accueil et 56 % d’un accompagnement à domicile par l’ASE. Près de 4 enfants sur 10 ont une notification d’orientation vers un Institut Médico-Educatif (IME) ou un Institut thérapeutique, éducatif et pédagogique (ITEP).

Au-delà des enfants bénéficiant d’une reconnaissance de handicap, certains professionnels ont un sentiment d’accroissement de situations de vulnérabilités liées à la santé, en particulier la santé mentale : « on est de plus en plus confronté à des enfants de plus en plus jeunes avec des troubles du développement et des fragilités psychologiques. On est au carrefour des politiques nationales et locales. Beaucoup d’enfant relève d’une éducation spécialisée, de problématique de psychiatrie et pédo-psychiatrie ».


La prise en charge d’un enfant dans le cadre de la protection de l’enfance peut émaner d’un accord entre la famille et les services de protection de l’enfance (mesure administrative) ou d’une décision judiciaire. Dans l’agglomération, 66 % des prises en charge (à domicile ou de placements) sont issues de décisions judiciaires (62 % en Isère). Cette tendance s’est accentuée ces 4 dernières années puisqu’elles en représentaient 60 % en 2016. La part de mesures judiciaires parmi les mesures d’accompagnement à domicile est encore plus élevée : 80% sont des mesures d’AEMO (judiciaires) et 20 % d’AED (administratives). Il s’agit du taux le plus élevé des territoires du département.

Au-delà de la prise en charge des enfants, des aides financières peuvent être proposées aux familles dans le cadre de la protection de l’enfance : les allocations mensuelles et les secours d’urgence[1]. En 2020, 7 715 aides ont été accordées pour plus de 3 300 familles. L’agglomération grenobloise concentre 54 % des aides accordées du département, alors qu’elle ne représente que 31 % de la population de moins de 18 ans. Cette surreprésentation est liée à la présence et au regroupement de personnes en situation administrative complexe sur ce territoire.

Entre 2019 et 2020, ces évolutions recouvrent différentes réalités³ :

  • Le nombre d’AM d’aide à l’enfant (AMAE) a baissé de 9 % (-17 % en Isère). Ces aides sont souvent attribuées aux familles pour leur permettre de payer les dépenses de cantines, centres aérés… Leur baisse s’explique donc par la fermeture des écoles en mars-avril-mai 2020.

  • Le nombre d’AM de subsistance (AMSU) a augmenté de 26 % (11 % en Isère). Ces aides étant attribuées pour l’achat de biens de première nécessité (dont nourriture), elles sont venues compenser la fermeture des cantines. En un an, ce sont près de 600 aides supplémentaires ont été attribuées à des familles en situation administrative complexe

  • Les secours d’urgence ont baissé de 2 % (-3 % en Isère). Cette baisse est compensée par le montant de ces aides qui lui a augmenté de 6 % (comme en Isère).


¹ *Information préoccupante (IP) : définie par le décret du 7 novembre 2013 : «information transmise à la cellule départementale […] pour alerter […] sur la situation d'un mineur, bénéficiant ou non d'un accompagnement, pouvant laisser craindre que sa santé, sa sécurité ou sa moralité sont en danger ou en risque de l'être ou que les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises ou en risque de l'être. La finalité de cette transmission est d'évaluer la situation d'un mineur et de déterminer les actions de protection et d'aide dont ce mineur et sa famille peuvent bénéficier.»

² Il s’agit d’interventions par des travailleurs sociaux au domicile des familles

³ Les Allocations Mensuelles d’aide à l’enfance (AMAE) ou de Subsistance (AMSU) sont des aides financières octroyées dans un cadre de prévention pour pallier une insuffisance temporaire des ressources familiales, lorsque la santé de l’enfant, sa sécurité ou son entretien le nécessitent.

Les Secours d’Urgence (SU) sont des aides financières ponctuelles accordées pour couvrir les besoins de subsistance et notamment répondre à une situation d’urgence, de rupture.


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