La viande reste un aliment très présent dans les assiettes, malgré une consommation en diminution constante depuis les années 1990. Si certains profils de consommateurs réinterrogent les pratiques héritées et modifient leurs comportements, les habitudes alimentaires régentent encore les assiettes de la majorité d’entre eux, révélant en prime d’importantes disparités sociales et territoriales.
Le Peak meat est-il derrière nous ?
Après une très forte hausse entre la révolution industrielle et la fin des années 1990, la consommation de viande rouge est en baisse régulière depuis une vingtaine d’années. Cette baisse est marquée à la fois chez les ménages les plus modestes, contraints par le renchérissement de son prix d’achat, et chez les catégories sociales aisées, à la recherche d’aliments moins caloriques et plus « vertueux », mais aussi chez les femmes, nettement moins consommatrices.
Près de 6 Français sur 10 estiment avoir diminué leur consommation de chair animale au cours des trois années précédentes et 40 % expriment leur volonté de l’amoindrir dans les trois prochaines années (Harris interactive, 2023). Cette tendance est toutefois à nuancer. En effet, les enquêtes de la CCI dessinent localement, depuis dix ans, une trajectoire générale de réduction de l’achat de viande fraîche (- 11 %), mais qui se fait au profit de la charcuterie et des plats préparés qui contiennent de la viande (+ 11 %). Par ailleurs, si une tendance à la baisse de la consommation de viande à domicile continue d’être observée, le volume global consommé tend à rattraper le niveau d’avant Covid. Pour expliquer ce paradoxe, il faut s’intéresser au secteur de la restauration, et notamment celui de la restauration rapide, qui, selon l’Institut de l’élevage (Idele) représente 24 % des volumes de viande produits et importés en France en 2017. Ainsi, une part conséquente, et en hausse tendancielle, de la consommation de viande intervient via les plats préparés et la consommation hors-domicile (+ 13,5 % du chiffre d’affaires de la restauration entre 2019 et 2022). L’achat général de viande se maintient donc, même si les ménages peuvent avoir l’impression de la diminuer.
Budgets alimentaires : des disparités territoriales et sociales
La part de la viande représente entre un cinquième et un quart des budgets alimentaires des ménages de l’Y grenoblois. Elle diminue de manière régulière depuis les années 1960, en raison d’un abaissement des coûts de production, et ce malgré une hausse de la quantité consommée. Plus récemment, c’est la tendance progressive à moins manger de viande qui fait baisser le budget. En zoomant sur le territoire, on observe que la viande occupe une place plus importante dans les budgets à mesure que l’on s’éloigne de la ville-centre, avec un maximum dans les communes les plus rurales. Autrement dit, on achète moins de viande en centre-ville. En revanche, dans les quartiers prioritaires et les communes populaires, son prix pèse davantage sur des budgets modestes. Paradoxe notable : plus on est riche, plus on consomme de viande. Mais si on décortique la tendance à la baisse depuis une vingtaine d’années, on constate que ce sont plus particulièrement les catégories socioprofessionnelles modestes et supérieures qui végétalisent leurs assiettes (Tavoularis G. et Sauvage E., 2018), ce dont rendent également compte les données d’enquête locales.
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